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L'Europe est capable de couvrir sa consommation directe d'électricité en 2050. Mais de sérieux efforts devront être réalisés pour installer suffisamment d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques. En effet, le rythme actuel d’installation de ces capacités renouvelables devra être multiplié par trois.
Comment atteindre la neutralité carbone en 2050 tout en satisfaisant nos besoins énergétiques via des moyens de production majoritairement intermittents (vent, soleil…) ? Elia, le gestionnaire du réseau belge d'électricité, s'est penché sur cette délicate question dans son étude Roadmap to net zero.
Pour ce faire, Elia a élaboré deux scénarios. Le premier prévoit une électrification massive de nos usages. Ainsi, le chauffage des bâtiments serait assuré par des pompes à chaleur, les véhicules à moteur thermique seraient remplacés par des voitures électriques, tandis que les maisons seraient équipées de batteries pour stocker l’électricité produite en journée par leurs panneaux photovoltaïques. Dans ce scénario, la consommation européenne d’électricité augmenterait de 70 % en 2050 par rapport à aujourd’hui.
Comment faire pour produire une telle quantité d'électricité ? Une électricité décarbonée qui plus est… Selon Elia, l'Europe dispose de suffisamment de sources d'énergie renouvelable pour couvrir ses besoins en "électrification directe". Mais de sérieux efforts devront être réalisés pour installer suffisamment d'éoliennes et de panneaux photovoltaïques d'ici 2050. En effet, le rythme actuel d'installation de ces capacités renouvelables devra être multiplié par trois.
En outre, il sera nécessaire, en Europe du Nord, de respecter la proportion 1/3 de photovoltaïque 2/3 d’éolien. Pourquoi ? Le solaire et l’éolien sont des technologies complémentaires. L’énergie solaire produit surtout de juin à août, tandis que l’énergie éolienne produit abondamment en hiver. Pour couvrir les besoins électriques de l’Europe toute l’année, il faut donc un bon équilibre entre l’éolien et le solaire.
Au total, l’Europe aura besoin de 2 190 GW de capacités renouvelables d’ici 2050 : 410 GW d’éoliennes en mer, 580 GW d’éoliennes terrestres, et 1 200 GW de panneaux photovoltaïques. L’Europe doit donc quasiment multiplier par sept son parc renouvelable actuel.
Que faire quand il n'y a pas de vent durant longtemps?
Selon Elia, une "découverte" importante de son étude est qu'un système électrique "bien conçu" permet de remédier à la majorité des fluctuations saisonnières de la production renouvelable. D'autres capacités seront néanmoins nécessaires pour s'en sortir lors de certaines périodes sans vent et sans soleil. Ce genre de phénomène météorologique peut durer jusqu'à "plusieurs semaines", selon Elia. Ainsi, à côté des 2 190 GW de capacités renouvelables, il faudra prévoir entre 240 et 400 GW de capacités "pilotables", c'est-à-dire qui ne dépendent pas de la météo : centrales à hydrogène, piles à combustible, centrales biomasse, stations de pompage-turbinage… Ces capacités s'ajouteront aux centrales nucléaires qui seront toujours présentes en France et dans les Balkans en 2050.
Par ailleurs, tous les pays européens n'ont pas le même potentiel au niveau des énergies renouvelables. Des interconnexions seront donc nécessaires pour transporter l'électricité des pays en excédent vers les pays en déficit. La Belgique, comme l'Allemagne, fait partie des pays en déficit. Ainsi, la moitié de la consommation belge d'électricité devra être couverte par des importations. Mais, selon Elia, "cela ne doit pas être un problème". "La Belgique est bien localisée", explique le gestionnaire du réseau. Elle dispose d'une côte qui lui donne accès à la production éolienne en mer de plusieurs pays : le Royaume-Uni, la Norvège…
Si l’Europe sera capable de couvrir ses besoins directs en électricité, ce ne sera pas le cas de ses besoins indirects. Ainsi, selon l’étude d’Elia, l’Europe devra importer environ 1 200 TWh de molécules vertes : hydrogène, ammoniac, méthanol… Ces molécules sont considérées comme vertes car elles seront produites à partir d’électricité renouvelable. Elles peuvent répondre à divers usages. Ainsi, l’ammoniac peut être utilisé dans un moteur sans dégager de CO2. L’hydrogène vert peut remplacer l’hydrogène carboné actuellement utilisé dans l’industrie.
Elia met cependant en garde : ces molécules vertes doivent être utilisées uniquement dans les secteurs qui ne peuvent pas être électrifiés directement. Ainsi, la voiture électrique est préférable à la voiture à hydrogène. Il est aussi préférable d’utiliser une pompe à chaleur pour chauffer son habitation plutôt qu’une chaudière à hydrogène.
Pourquoi ? Transformer l’électricité en hydrogène, ammoniac ou méthanol occasionne de grosses pertes énergétiques. Il est donc plus efficace d’utiliser directement l’électricité que de la transformer en différentes molécules vertes. En outre, le potentiel de production d’électricité verte est limité en Europe. Elia conseille donc d’utiliser directement l’électricité produite chez nous plutôt que de la transformer en molécules. Les molécules vertes, quant à elles, pourront être importées depuis des pays qui ont de gros excédents de production d’électricité renouvelable. Les pays fortement ensoleillés par exemple…
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